“ À toi, le parent que j’étais il n’y a pas si longtemps,
Le ciel vient de te tomber sur la tête : le bébé au creux de ton ventre, ce n’est finalement pas celui dont tu rêvais. Et cet enfant, que tu sentes encore ses mouvements sous ta peau ou qu’il vienne de pousser son premier cri, tu as l’impression qu’il n’y a plus de quoi s’émerveiller devant lui.
Face au choc, tu certifies même à tes proches que tu ne seras plus jamais heureux. La vie paraît tellement injuste à première vue. Des « pourquoi ? » tournent en boucle dans ta tête et des « comment je vais y arriver ? » s’infiltrent dans tes pensées les plus sombres, celles que tu n’oses pas partager parce qu’elles te paraissent si horribles que les formuler tout haut est impensable.
Je n’ai pas rebondi tout de suite et je voudrais te dire qu’il faut parfois accepter que cela prenne du temps, que tout ira mieux quand tu auras appris à connaître ton bébé et à comprendre qu’il va être capable de beaucoup. Quand on te parle du retard qu’il aura par rapport aux autres enfants, je voudrais te parler du fait que ce sont ces mêmes enfants plus en avance que lui qui le tireront vers le haut et cela te fera prendre conscience de la richesse qu’est l’inclusion. Quand on te dit que tous ces rendez-vous et ce suivi constant seront épuisants, j’aimerais te dire qu’ils t’apporteront aussi du bonheur lorsque tu verras les fruits que cela porte et la relation que tu tisseras avec toutes ces personnes bienveillantes autour de toi.
Ce n’est pas le voyage que je pensais emprunter, ça non, mais aujourd’hui, presque un an plus tard, je ne saurais pas faire machine arrière. Sans ce bébé extraordinaire dans mes bras, je ne sais pas qui je serais mais je sais que je n’aurais pas réalisé autant de choses, que je n’aurais pas fait autant de belles rencontres, que je n’aurais pas appris à ouvrir les yeux sur le monde. Tout ça, est-ce le hasard ou est-ce une probabilité d’apprendre à aimer plus ? D’apprendre à se découvrir soi-même et à découvrir ceux qui nous entourent de manière authentique ?
Quelques mois après la naissance de mon bébé, une maman m’a dit ces mots – qui resteront toujours gravés en moi : « Peut-être qu’en leur fort intérieur, la majorité des gens poussent un ouf de soulagement en se disant que ce n’est pas chez eux que la foudre est tombée mais dans mon cœur à moi, je sais que j’ai gagné à la loterie. C’est un peu comme si nous avions toujours vécu en noir et blanc et que d’un coup, il avait allumé la couleur en débarquant dans nos vies ».
Je n’étais pas prête à comprendre ces mots mais aujourd’hui, je les trouve si justes. Si vrais. Je suis plus heureuse que je ne l’étais avant tout ça.
Et pourtant, je reviens de très loin en terme d’acceptation de la trisomie 21 dans ma vie. Alors à toi, cher parent qui ne te sens pas capable, j’ai envie de te dire que tu ne sais pas encore que tu l’es. Tu vas y arriver. Fais toi confiance et fais confiance à ton bébé : il te surprendra de la plus jolie des manières en étant juste l’enfant dont tu as besoin pour évoluer vers la meilleure version de toi-même. Dans une nouvelle vie.
R. “